Pour tenter de
discréditer les personnels de la Fonction Publique aux yeux de
la population, le ministre oppose à leurs revendications légitimes
une campagne de désinformation et un chantage entre emplois et
salaires. Les fédérations syndicales de la Fonction Publique
entendent dans cette publication mettre en évidence les manipulations,
exposer la situation salariale réelle, montrer qu’il est
possible et utile d’augmenter les salaires dans la Fonction Publique.
La feuille de
paye « Moyenne » dont parle le ministre n’est pas un
instrument de mesure du pouvoir d’achat.
Le Ministre évoque une « feuille de paye
moyenne », dont le pouvoir d’achat ne cesserait d’augmenter,
même en l’absence de mesures générales. Outre
que cette évaluation ne porte que sur les agents de l’Etat
alors que le dossier salarial concerne aussi les territoriaux et les hospitaliers,
cette feuille de paye a pour caractéristique d’être
purement virtuelle, et résulte d’instruments théoriques
de mesure détournés de leur finalité.
Pourquoi la Rémunération moyenne des personnels
en place (RMPP) n’est pas un indicateur pertinent pour mesurer l’évolution
du pouvoir d’achat des agents ?
La RMPP augmente automatiquement et permet d’afficher un «
+ » même en l’absence de revalorisation de la valeur
du point ou de mesures catégorielles.
Cet indicateur inclut en effet les mesures générales d’augmentation
du point d’indice pour l’année en cours et la répercussion
en année pleine des mesures de l’année précédente,
mais aussi :
- L’effet des mesures catégorielles (revalorisation des
grilles, reclassements), très souvent sectorielles, mais traduites
sur la feuille de paie moyenne.
- Les effets des déroulements de carrière, estimés
forfaitairement.
- Les effets de structure intégrant l’évolution
du poids des différentes catégories. Il prend en compte
l’évolution des qualifications, mais aussi les politiques
de suppression d’emploi (par exemple plus on supprime d’emploi
en bas de la grille, plus la rémunération moyenne augmente).
Il existe aussi un autre indicateur, le salaire Moyen par Tête
(SMPT) qui mesure le coût moyen d’un agent en intégrant
les effets du remplacement des agents partis à la retraite par
des personnels plus jeunes, moins payés.
Selon ses besoins le gouvernement utilise l’un
ou l’autre. La RMPP affiche des « résultats
» plus élevés. C’est ce qui lui vaut d’être
mise en avant aujourd’hui.
Dans les deux cas, les données – qui peuvent
avoir leur intérêt en terme d’étude et de prévisions
budgétaires - ne mesurent nullement l’évolution réelle
du pouvoir d’achat des agents de la Fonction publique.
Public / Privé : le discours tendancieux du ministre.
La comparaison des revenus moyens n’est pas significative,
la structure des emplois n’est pas la même. Les éléments
avancés par le ministre sont choisis : il cite séparément
les salaires moyens des agents l’Etat et des hospitaliers. Il omet
la Fonction Publique territoriale, où les rémunérations
sont les plus basses.
Lorsqu’il compare l’évolution des revenus, le ministre
choisit pour origine 1990 et limite l’étude à la Fonction
Publique de l’Etat. Différents éléments expliquent
que sur la première décennie, les salaires moyens augmentent
plus vite pour les fonctionnaires : les mesures du protocole Durafour
ont été progressivement mises en œuvre à partir
de 1990 ; la revalorisation salariale accordée aux enseignants
entraîne, du fait de leur nombre, une progression de la rémunération
moyenne des agents de l’Etat. C’est aussi le moment où
la rémunération, plus basse en moyenne des agents des PTT
est sortie de ces données. Cette évolution plus forte n’est
pas liée à l’évolution du point d’indice.
En fin de période, de 1999 à 2002, la tendance est inversée.
L’évolution
du pouvoir d’achat ne peut être mesurée qu’à
partir du point d’indice
Comparer de façon précise et équitable
l’évolution des traitements à celle des prix, nécessite
de prendre en compte des situations identiques.
Le traitement indiciaire d’un fonctionnaire est le résultat
d’une multiplication entre :
- Un indice – traduit en nombre de points - qui correspond à
sa place dans une grille en fonction de sa qualification, de sa carrière,
- et la valeur de ce point d’indice. Cette valeur du point d’indice
est commune à l’ensemble des fonctionnaires dans l’ensemble
de la fonction publique.
La seule référence possible est
la valeur du point.
C’est aussi la valeur du point qui permet de comparer les traitements
des fonctionnaires à qualification équivalente.
Ne pas se référer à la valeur du point d’indice,
c’est faire disparaître la notion même de carrière.
En effet, un avancement, une promotion, la reconnaissance d’une
qualification acquise, ne se traduiraient plus par un salaire plus élevé,
mais compenseraient en totalité ou en partie la perte du pouvoir
d’achat.
La réalité
de l’évolution du pouvoir d’achat
Pouvoir d’achat de la valeur du point :
Evolution entre le 1er janvier 2000 et le 31
octobre 2004.
Par rapport à l’indice des prix hors tabac : - 4,89 %
Par rapport à l’indice des prix avec tabac : - 5,93 %
A la fin de l’année la perte atteindra 5
% par rapport à l’indice hors tabac.
En cumulé, mois après mois, les pertes de pouvoir d’achat
sur la période représentent l’équivalent de
plus d’un mois et demi de traitement.
Pour les retraites, la modification du système
n’a rien résolu. Ni sur le contentieux (période écoulée
et référent dévalorisé), ni sur l’actualité
(+ 1,5 % pour 2004 avec une inflation qui sera supérieure).
Le décalage entre inflation (prix hors tabac) et
évolution du point d’indice.
Sur une période plus
longue le pouvoir d’achat du point d’indice s’est
encore plus profondément dégradé.
Le minimum Fonction publique : Un sous SMIC.
Les dispositions unilatérales prises par le Ministre
(décret du 9 juillet 2004) sur le minimum Fonction publique suite
au relèvement du SMIC se traduisent par moins de 3 euros au-dessus
du SMIC 35 heures et près de 40 euros sous le SMIC 39 heures.
Rappelons que compte tenu de la date de mise en œuvre
de la RTT dans la Fonction publique, c’est la référence
au SMIC 39 heures (GMR IV) qui devrait être prise en compte.
En imposant un autre dispositif, le gouvernement a donc décidé
« d’économiser » sur les salaires les plus bas.
A noter que la « Course à l’échalote
» du minimum Fonction publique derrière le SMIC, amplifie
l’écrasement de la grille.
- Avec des évolutions de carrières du bas de grille qui
n’existent quasiment plus (1 à 2 points soit des gains
de 4 à 8 euros pour les premiers échelons).
- Et des perspectives catastrophiques conduisant à ce que, en
juillet 2005, si rien n’est fait d’ici là, le 3ème
échelon de l’échelle 4 (adjoint administratif) serait
au niveau du SMIC et le début de la catégorie B se situerait
4% seulement au dessus de celui-ci.
- Avec un tassement de tous vers le SMIC. Le début de la catégorie
B (recrutement niveau bac) est passé de 1,33 fois le SMIC en
1983 à 1,10 en 2004. Celui de la catégorie A (recrutement
à bac+ 3) de 1,75 fois le SMIC toujours en 1983 à 1,32
fois celui-ci aujourd’hui.
De nouveaux prélèvements dès le 1er janvier 2005
:
Pour les actifs :
- Elargissement de l’assiette de la C.S.G. et du C.R.D.S. de
95 à 97 % de la rémunération brute : effet de -0,16%
sur le pouvoir d’achat disponible.
- Cotisation pour le régime de retraite additionnel (5 % sur
un montant plafonné à 20 % du traitement indiciaire).
Elle se traduira dans l’immédiat par une baisse du pouvoir
d’achat disponible pouvant aller jusqu’à 1%.
Pour les retraités : augmentation
du taux de la C.S.G. de 6,2 à 6,6 %.
Oui, il est possible d’augmenter
les salaires dans la Fonction publique
Le Ministre se répand sur les contraintes des
finances publiques et sur le coût qu’auraient pour tous la
satisfaction de nos revendications. Et histoire d’en rajouter et
de tenter de mettre un coin entre la population et les agents de la Fonction
Publique il parle d’une augmentation de 14 % à 20 % des impôts
!
Ce chiffre mériterait d’être précisé
: le ministre parle-t-il d’une augmentation des impôts sur
le revenu ou bien englobe-t-il également les impôts locaux
et les cotisations assurance maladie ? On pourrait rétorquer qu’il
suffirait de diminuer d’un quart les exonérations de cotisation
décidées en faveur du patronat (et dont on connaît
l’efficacité notamment sur l’emploi et les salaires)
pour dégager sur le budget de l’Etat un montant équivalent.
L’école, les hôpitaux… tous les services publics
sont essentiels pour la population et l’aménagement du territoire.
Leurs agents ont droit, comme tous les autres salariés à
une juste rémunération de leur travail.
Contrairement à ce qui ressort de la campagne
de désinformation menée par le Ministre, la part des richesses
produites dans le pays, mesurée par le PIB, consacrée aux
rémunérations des agents de l’Etat ne cesse de reculer.
Entre 1999 et 2003, elle est passée de 4,38 % à 4,25 % (0,13
points qui représentent quelque 2 milliards d’euros soit
près de 3 % de la masse salariale).

Poids des rémunérations
des agents de l’Etat dans le PIB
(Source : Fonction publique, faits et chiffres 2003)
Le gouvernement s’est lui-même enfermé
dans un certain nombre de contradictions, par son choix délibéré
de se priver de recettes au travers d’une politique fiscale ni juste
ni justifiée, qui ignore les besoins de solidarité et ceux
des services publics.
Le gouvernement nous propose d’accepter une réduction
du nombre d’emplois pour augmenter les salaires. Nous connaissons
aujourd’hui baisse de l’emploi et baisse des salaires.
C’est inacceptable au regard des besoins du service public.
Incohérent au regard de la situation de l’emploi.
Inconséquent au regard du rôle de l’emploi dans la
croissance.
Les salaires sont un élément de la croissance
par la consommation. Ils influent ainsi sur l’emploi et sur les
recettes fiscales.
Augmenter les salaires des fonctionnaires, comme d’ailleurs
ceux de l’ensemble des salariés, c’est socialement
juste, et c’est économiquement efficace.
23 novembre 2004
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